Cas clinique 15/12/2025 "Le refus de toilette"

Publié le 16 décembre 2025 à 15:24

Situation -> Madame L, 91 ans, atteinte de la maladie d'Alzheimer (stade modéré), refuse la toilette depuis 3 jours : cris, agitation, opposition aux soins.

Quelles sont vos actions à court et moyen terme ?

 

Réponse -> 

A court terme

1) Sécuriser et évaluer avant d’insister

  • Stopper l’escalade : si elle crie, s’agite, se débat → on interrompt et on revient plus tard (objectif : éviter un vécu traumatique et un soin “en force”).

  • Évaluer rapidement ce qui déclenche :

    • douleur (arthrose, escarres, mycose, constipation, infection urinaire…)

    • inconfort (froid, pudeur, position, fatigue)

    • anxiété / délire / peur (ne reconnaît pas le soignant, se sent agressée)

    • besoin d’uriner / faim / soif

    • moment de la journée (toilette trop tôt, “sundowning” en fin de journée)

  • Constantes / signes d’alerte si changement récent : fièvre, confusion augmentée, douleur nouvelle, odeur urines, rétention, chute, lésions cutanées.

2) Adapter la communication (approche relationnelle)

  • Arriver calmement, se mettre à hauteur, se présenter à chaque fois, parler lentement.

  • Valider l’émotion : “Je vois que ça vous inquiète / que ça vous met en colère.”

  • Éviter la confrontation : ne pas dire “il faut”, éviter “mais si”.

  • Donner un choix simple (2 options max) :

    • “Vous préférez laver le visage ou les mains d’abord ?”

    • “Vous voulez Madame X (soignante) ou moi ?”

  • Expliquer geste par geste + demander l’accord à chaque étape.

3) Modifier le soin : objectif = hygiène minimale + confort, pas “toilette parfaite”

  • Proposer une toilette partielle (visage/mains/aisselles/siège) au lieu d’une toilette complète.

  • Fractionner : 5 minutes maintenant, 5 minutes plus tard.

  • Favoriser ce qui marche souvent :

    • serviette chaude, pièce chauffée, couvrir les zones non lavées (pudeur)

    • musique qu’elle aime, objet rassurant

    • laisser faire ce qu’elle peut (auto-toilette guidée : “vous lavez votre bras, je fais le dos”)

  • Si refus du bain/douche : proposer gant + sans rinçage, ou shampoing sec si besoin.

  • Préserver la dignité : limiter le nombre de soignants présents, gestes lents, prévenir avant de toucher.

4) Travailler en équipe et tracer

  • Transmettre aux collègues : ce qui a déclenché / ce qui a calmé, le moment, la personne avec qui ça passe mieux.

  • Tracer : refus, comportements, tentative d’adaptation, tolérance, état cutané, risques (macération, rougeurs, odeur, lésions).

5) Informer le médecin si suspicion somatique ou changement de comportement

  • Si douleur probable : demander évaluation et adaptation antalgiques.

  • Si suspicion infection/constipation/déshydratation : bilan clinique, éventuellement BU/ECBU selon protocole, etc.
    (Le refus de toilette “nouveau” chez une personne Alzheimer = toujours penser cause médicale avant tout.)

À moyen terme

1) Plan de soins individualisé “toilette”

  • Identifier son meilleur moment (souvent après petit-déj, ou après repos).

  • Définir une stratégie stable :

    • mêmes mots, mêmes étapes, même ordre

    • si possible mêmes soignants référents

  • Mettre un “rituel” (ex : toilette + crème mains + parfum léger qu’elle reconnaît).

2) Approche centrée sur la personne (biographie)

  • Recueillir auprès des proches :

    • habitudes (douche le soir ? gant ? intimité ? pudeur ?)

    • ce qu’elle aimait (musique, parfum, tenue, coquetterie)

    • ce qu’elle détestait (eau sur le visage, cheveux mouillés, être nue…)

  • Adapter en conséquence (parfois juste “ne pas déshabiller entièrement” change tout).

3) Prévention des complications liées au refus

  • Surveiller et prévenir : lésions cutanées, macération, mycoses, escarres, odeurs, inconfort intime.

  • Renforcer soins de confort : change, hydratation cutanée, soins de bouche, ongles, coiffage doux.

4) Analyse des troubles du comportement (type ABC)

  • Antecedent : quand / avec qui / où / comment ça commence ?

  • Behavior : cris, coups, fuite, pleurs…

  • Consequences : qu’est-ce qui apaise ? qu’est-ce qui aggrave ?
    → Ça permet de construire une conduite commune d’équipe.

5) Si refus persistant + mise en danger : staff éthique / réévaluation

  • Discuter en équipe + cadre + médecin : jusqu’où insister ? quelles alternatives acceptables ?

  • Impliquer la famille / représentant légal : expliquer le risque, chercher des solutions respectueuses.

  • La contention / sédation “pour faire la toilette” = dernier recours, très encadré, et uniquement si bénéfice/risque clairement argumenté.

Petites “astuces” qui marchent souvent

  • “On se prépare pour sortir / pour recevoir quelqu’un” (donner du sens).

  • Proposer “on se lave les mains” puis enchaîner doucement.

  • Serviette chaude sur les épaules + couvrir le ventre/jambes.

  • Laisser tenir le gant, même si le geste est maladroit : sentiment de contrôle.

Voilà, le refus de soins n’a plus de secret pour vous ! Et s’il en reste, écrivez-moi, je me ferai un plaisir de vous répondre !

Mail ->  info@soutien-ifsi.fr

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